Santé à Bordeaux : la métropole girondine change de visage. En 2023, le CHU de Bordeaux a réalisé plus de 550 000 consultations, soit +6 % en un an, selon ses chiffres internes. Dans le même temps, la télémédecine locale a bondi de 42 %. Cette double dynamique — afflux physique et essor numérique — illustre la mutation sanitaire observée sur les rives de la Garonne. Décryptage rigoureux, loin des effets d’annonce.


Panorama sanitaire local : chiffres clés 2024

Bordeaux, treizième ville la plus peuplée de France, affiche désormais 264 815 habitants (Insee 2024). Sur ce total, 19 % ont plus de 65 ans, un record régional qui dope la demande en soins chroniques. Le CHU de Bordeaux, fort de ses 3 sites (Pellegrin, Saint-André, Haut-Lévêque), concentre 9 700 employés et 3 500 lits.

Quelques indicateurs marquants :

  • Taux de vacance des médecins généralistes en Gironde rurale : 12 % (ARS, mars 2024).
  • Délai moyen pour un rendez-vous en ophtalmologie : 71 jours (Doctolib, janvier 2024).
  • Épisodes de pollution aux particules fines PM2,5 : 14 jours en 2023, contre 9 en 2021 (Atmo Nouvelle-Aquitaine).

D’un côté, la capitale du vin attire des talents hospitaliers (700 internes formés en 2023), mais de l’autre, la périphérie nord manque toujours de cabinets de proximité. L’équation sanitaire reste donc contrastée.

Comment la télémédecine redessine la relation patient–médecin ?

La question revient sans cesse dans les forums santé : « Pourquoi la télémédecine progresse-t-elle à Bordeaux ? » La réponse tient en trois facteurs observables depuis 2022 :

  1. Couverture fibre optique de 98 % sur la métropole (Orange, 2023).
  2. Incitations financières régionales : 50 € de forfait équipement par consultation vidéo pour les médecins pionniers.
  3. Participation active des start-up hébergées au Hôtel de la French Tech (Quinze-Quinze, Bealy, Curecall).

En 2024, le nombre de téléconsultations enregistrées par l’Assurance Maladie en Gironde a dépassé 410 000 actes, soit 17 % de l’activité de médecine générale. J’ai interrogé deux généralistes du quartier Saint-Michel : l’un apprécie la diminution des « non-motifs », l’autre regrette « un contact humain sacrifié ». Ma propre expérience d’usager confirme cette ambivalence : efficacité lorsque je renouvelle une ordonnance, mais difficulté à faire ausculter une douleur thoracique via webcam.

Cette tension illustre un enjeu majeur : optimiser la régulation des flux patients pour désengorger les urgences sans créer d’inégalités numériques. Le Plan santé numérique 2023–2027 du ministère cible justement la formation des seniors à ces outils. Bordeaux teste déjà une hotline dédiée, pilotée par l’Université : 1 600 appels en six mois, 84 % résolus.

Prévention : quels gestes simples adopter à Bordeaux ?

La santé publique ne se limite pas aux hôpitaux flambant neufs. Les Bordelais peuvent réduire leurs risques sanitaires par des actions quotidiennes, adaptées aux réalités locales :

  • Admirer la Garonne, oui, mais privilégier les berges piétonnes le matin, moins exposées aux pics d’ozone.
  • Privilégier le vélo électrique (réseau V³) : l’Observatoire Vélo dit –10 % de BMI moyen chez les abonnés réguliers.
  • Se vacciner contre les arboviroses : 23 cas de dengue importée recensés en 2023 en Gironde, le moustique tigre progresse.
  • Participer aux ateliers « Cuisine santé » de la Cité du Vin : la diététique régionale revisitée sans excès de sel.
  • Utiliser les fontaines d’eau potable installées place de la Bourse : réduire la consommation de plastiques et micro-particules.

Mon opinion : ces gestes paraissent simples, mais leur adoption reste marginale (à peine 18 % des habitants suivent les recommandations de l’ARS sur l’activité physique). L’enjeu, ici, est culturel. À l’image de la tradition culinaire locale, associer prévention et plaisir est la clé.

Qu’est-ce que le plan régional santé-environnement 2022-2027 ?

Porté par la Préfecture de Nouvelle-Aquitaine et l’Agence Régionale de Santé, ce programme vise trois objectifs :

  1. Réduction de 15 % des émissions d’oxydes d’azote d’ici 2027.
  2. Transition des cantines publiques vers 50 % d’alimentation durable.
  3. Surveillance accrue de la qualité de l’eau potable dans la nappe alluviale Garonne-Dordogne.

Ces mesures, adoptées en décembre 2022, entrent progressivement en application. Les premiers bilans, attendus pour juin 2024, diront si la courbe de prévalence de l’asthme infantile, actuellement à 9,2 %, s’infléchit.

D’un côté l’innovation, de l’autre les inégalités territoriales

Bordeaux s’affiche souvent comme un laboratoire. L’Institut Bergonié, centre de lutte contre le cancer, a inauguré fin 2023 un accélérateur de protons, unique dans le sud-ouest. Coût : 47 millions d’euros. Cet équipement raccourcit la radiothérapie sur certains sarcomes de 30 %. Impressionnant.

Mais un chiffre tempère l’enthousiasme : 28 % des patients girondins parcourent plus de 40 km pour accéder à un spécialiste (Drees 2023). À la lumière de ces données, je distingue deux réalités :

  • D’un côté, la métropole signe des partenariats avec le MIT pour la chirurgie robotique (premier essai prévu au bloc Pellegrin, novembre 2024).
  • De l’autre, les communes de l’Entre-Deux-Mers peinent à recruter un seul pédiatre. Le bus santé lancé par la Croix-Rouge en février 2023 compense, mais reste un dispositif palliatif.

Cette fracture géographique interroge le modèle bordelais. Faut-il concentrer l’excellence, quitte à déplacer les patients, ou décentraliser les compétences ? Les élus, dont le maire Pierre Hurmic, évoquent une « santé de proximité sous 15 minutes ». Objectif louable, encore théorique.


La santé à Bordeaux bouge vite, entre essor de la télémédecine, innovations oncologiques et préoccupations environnementales. En tant que journaliste spécialisé, j’observe une métropole oscillant entre modernité flamboyante et poches de vulnérabilité. Je continuerai à scruter ces évolutions ; vous pouvez, de votre côté, partager vos expériences ou questions afin d’alimenter nos prochains dossiers — d’autres volets sur la e-santé, l’alimentation durable ou encore la santé mentale des étudiants bordelais sont déjà sur ma table de travail.